1.
Nous avons rencontré toute une série d'exemples interdisant de confondre
le phénotype et le génotype :
Le
phénotype de référence peut être contrôlé par
des génotypes différents
: nous avons rencontré cette relation dans deux types de situations très
différentes.
Tout d 'abord, il peut exister un polymorphisme génétique naturel. Ce polymorphisme
est plus ou moins grand, suivant le gène : parfois, quelques dizaines voire
une centaine de formes allèliques d'un même gène co-existent dans une population.
Cette co-existence signifie que ces allèles sont suffisamment fonctionnels
pour ne pas être éliminés par le milieu. En première approximation, on peut
considérer
que leur phénotype est identique. C'est ainsi que nous avons rencontré plusieurs
formes d'hémoglobine a ou ß qui ne donnent aucun
phénotype particulier alors
qu 'elles sont différentes de la forme la plus répandue (Fiche 19).
Par ailleurs, chez les diploïdes, les génotypes homozygotes de référence ou
hétérozygotes peuvent donner le même phénotype lorsque le caractère de référence
est dominant (par exemple si le génotype a+/a+ donne le même phénotype que
l 'hétérozygote
a+/a -Fiche -.
Cela peut être également vrai pour un double hétérozygote ( a/a+ b/b+ : Fiche
).
Un phénotype mutant
peut être dû à des génotypes très divers.
Par exemple, les modifications du transport de l'oxygène ne sont que l'une
des causes des anémies héréditaires. Dans ce sous-ensemble, nous avons distingué des
anémies dues à des modifications de la chaîne a ou
de la chaîne b de l'hémoglobine
(Fiche 33).
Autre exemple rencontré, un phénotype auxotrophe peut être dû à la mutation
de l'un des nombreux gènes intervenant dans la biosynthèse envisagée (Fiche
28/29). Ou encore, la coloration de l'oeil de la drosophile peut être modifiée
par de nombreux gènes intervenant dans deux chaînes de biosynthèse ou dans
le dépôt
des pigments (Fiche 31).
Un gène peut intervenir
dans la réalisation de plusieurs caractères.
Le cas d'une maladie héréditaire avec des symptômes multiples illustre ce
cas jusqu 'à la caricature (Fiche 30).
Il n'y a pas toujours
une seule différence génétique entre la souche de
référence et la souche mutante.
Nous avons rencontré deux exemples de souches construites par l'expérimentateur
dont le caractère mutant ne découle pas de la mutation d'un seul gène: il
s'agit
d'une souche à yeux blancs de la drosophile, dont les deux chaînes de biosynthèse
sont interrompues, chacune à la suite de la présence d'un gène muté (Fiche31)
et d'une souche de levure auxotrophe pour l'histidine et manquant de deux étapes
enzymatiques (Fiche).
Nous verrons que l'on peut être en présence de ce type de situation dans des
conditions naturelles (Thème ?).
Plusieurs génotypes
peuvent ne pas conduire à des phénotypes différents
selon les conditions de milieu :
Un enfant [pcu] avec un régime pauvre en phényl alanine ne présente pas de
trouble particulier et ressemble tout à fait à un enfant [de référence].
Un mutant [auxotrophe] sur milieu additionné du produit convenable ne se distingue
pas dans ces conditions de la souche de référence.
Un mutant [résistant] ne se distingue pas de la souche de référence [sensible]
en absence de l'agent toxique
Tout cela confirme qu'une analyse qui se contente d'observer les caractères est
largement insuffisante et mène à des erreurs.
2. En réalité, les études génétiques doivent être faites caractère par caractère
puis gène par gène.
C'est
ce que nous avons fait progressivement
au long des 7 thèmes qui viennent d 'être
présentés. Il suffit pour s'en convaincre
de reprendre leurs titres.
Les caractères ne « passent » pas
eux-mêmes d'une génération à l'autre.
En réalité, l'hérédité est sous le contrôle de « facteurs » véhiculés
par les cellules sexuelles (thème1).
Les facteurs imaginés
par Mendel sont constitués d' ADN et sont maintenant
appelés gènes. Leur nature moléculaire permet la stabilité au cours des
générations
et le contrôle de la synthèse des polypeptides, via la transcription et le
code génétique (thème 2).
De manière semble-t-il
contradictoire avec les mécanismes assurant la
stabilité au cours de la réplication, on observe qu'un gène peut exister
sous plusieurs formes dans les populations naturelles (thème3).
L'étude au laboratoire
de la production de mutants chez la levure indique qu'ils proviennent d'infidélités
de la réplication. Elles sont « naturelles » ou
provoquées par les agents mutagènes. Les conditions de milieu peuvent révéler
la diversité génétique qui provient de ces erreurs (thème 4).
Les caractères sont élaborés
par des successions d'évènements biochimiques. Chacun de ces événements
est sous le contrôle d'un polypeptide au moins, découlant
lui-même de l'activité d'un gène (thème 5).
Chez un hétérozygote
(référence + mutant ) un caractère peut être masqué par « l'autre » (thème
6) .
Lorsque deux mutants
développent
un même phénotype récessif, l' hétérozygote
(mutant 1 + mutant) présente le caractère de référence ou le caractère mutant
. Cette observation permet de mettre en évidence des gènes allèles (thème
7).
3. Toute
cette première partie décrit des phénomènes qui découlent de la nature
moléculaire du gène , responsable ici de trois propriétés, dont les deux premières
appartiennent globalement à l' ADN.
Fait
d'ADN, le gène
est le plus souvent reproduit fidèlement à chaque
division cellulaire. Cependant, le gène n'est pas une unité de réplication,
celle-ci étant de taille beaucoup plus importante (on la nomme réplicon
).
Fait d' ADN, il est
parfois reproduit avec des différences. Ces differences
sont d 'importance variée, allant d'un nucléotide remplacé par un autre, jusqu'à des
modifications beaucoup plus importantes. Capable de muter le gène n'est cependant
pas une unité de mutation. En réalité, compte tenu des observations sur les
polypeptides ou sur les gènes, la plus petite partie de l' ADN capable d' être
modifiée est le nucléotide, que l'on peut considérer comme l'unité de mutation.
Fait d'ADN, il est
transcrit en ARN, lui-même traduit en un polypeptide.
Seule cette troisième propriété est propre au gène. Elle permet de le définir
: le gène est une unité informationnelle qui contrôle la structure d' un
polypeptide, unité de structure et de fonction biochimique . Nous avons abordé cette
propriété de
deux manières.
La première est assez directe et biochimique. Elle permet de constater que la
réalisation d' un caractère nécessite très souvent plusieurs polypeptides
et donc autant de gènes fonctionnels.. Cela est assez facile à étudier dans
le cas de la chaîne de biosynthèse d'un métabolite.
L'étude de mutants montre qu'un polypeptide peut ne pas être fonctionnel lorsque
le gène est modifié, soit au niveau d'un seul nucléotide soit à la suite
d' une
mutation de taille plus importante.
La deuxième manière est indirecte, et purement génétique : il est en effet
inutile de connaître les polypeptides pour définir des groupes de complémentation.
Des mutants peuvent présenter le même phénotype à la suite de mutations affectant
soit le même gène soit des gènes différents. Chacun des groupes correspond à la
modification du même gène, dont la fonction est altérée. Cette analyse est
extrêmement
efficace puisque la fonction elle -même peut être ignorée sans que cela gène
le raisonnement : on définit une unité de fonction, avant même de l'étudier.
4. On peut
même résumer la première partie de manière encore plus resserrée.
Nous
sommes
partis
d'observations
de la
vie de
tous
les jours
: les
membres
d' une même famille se ressemblent. A l 'arrivée de cette première partie,
nous pouvons résumer nos analyses sous forme d' un simple schéma très épuré, à la
condition de bien prendre garde au sens de tous les élements et d'être capable
de les illustrer par des exemples.
A partir de l 'information
contenue dans le génome cellulaire, il y a édification
des caractères (on peut dire aussi « réalisation des phénotypes ») grâce à l'action
de polypeptides : cela est symbolisé par la flèche pointillée.
Un même génotype peut
conduire à des phénotypes différents ; à l' inverse,
un même phénotype peut être contrôlé par des génotypes différents. Le tout dépend
du milieu, qui révèle ou non les différences informationnelles. C'est le sens
des pluriels utilisés entre parenthèses.
Un génotype peut être
constant au cours des générations, grâce à la réplication
semi-conservative, qui est symbolisée par la boucle flêchée.
De manière implicite,
les pluriels indiquent également la diversité des
génotypes : elle est due aux mutations, qui sont la source de la variabilité des êtres
vivants
Ces quatre points sont eux-mêmes contenus dans le titre choisi pour la première
partie qu'il est utile de relire et de méditer afin de constater ... que
tout y est!!. Constatez-le vous même, ce qui est un exercice intéressant
pour vérifier
que, maintenant, le sens de tous les mots est devenu clair et précis.
Du génome aux phénotypes : le gène est une unité de
fonction qui peut muter
ou comment les caractères héréditaires sont-ils
contrôlés et réalisés.
Nous allons maintenant nous intéresser à une deuxième partie, dont le titre
est également très révélateur, nous le verrons :
D'une génération à l 'autre ou comment les gènes
sont -ils transmis et brassés ?