Thème 9: Troisième conséquence de la méiose, la recombinaison intrachromosomique : cas de la levure.
Fiche 54: La recombinaison entre gènes situés sur le même chromosome

Fiche expérimentale : interprétation et conclusion



1. Mise en évidence d'une liaison entre les gènes étudiés

Suivons tous les conseils prodigués dans les thèmes précédents et ne brûlons pas la moindre étape ! !

- l ' hypothèse d 'une seule différence génétique correspondant à la différence phénotypique [ his-] / [his+] peut être conservée puisque nous observons 512 individus (439+73) [ his- ] et 488 individus (420+68) [ his+ ] (c2 non significatif)). Ce résultat confirme celui observé dans le thème précédent (fiche46), ce qui n'est pas étonnant puisque le même mutant auxotrophe pour l 'histidine est étudié. Soient a et a+ les deux allèles du gène en cause

- l 'hypothèse d 'une seule différence génétique correspondant à la différence phénotypique [met -] / [met+] peut également être conservée puisque nous décomptons 507 individus ( 439+68 ) [ met+ ] et 493 individus (420+73) [met -] ( c2 non significatif ). Soient b et b+ les deux allèles du gène en cause.

- nous constatons qu 'il existe une réassociation des caractères et que qualitativement le résultat est le même que celui observé dans le thème précédent : il existe deux associations parentales et deux associations recombinées. Les hypothèses envisagées sont jusque là strictement identiques à celles envisagées dans le croisement [his-] X [ try-] du thème précédent (fiche46).

Mais l'observation quantitative des résultats expérimentaux pose un nouveau problème : en effet , si les deux couples d 'allèles a / a+ et b / b+ sont sur des chromosomes différents, nous nous attendons à observer des quantités égales des 4 phénotypes possibles (les deux parentaux, correspondant aux génotypes ab+ et a+b, les deux recombinés, correspondant aux génotypes a+b+ et a-b- ). Comme ce n 'est pas le cas nous ne pouvons pas conserver l' hypothèse : les deux gènes envisagés ne sont pas sur des chromosomes différents. Et, s' ils ne sont pas sur des chromosomes différents... on voit mal comment ne pas faire une hypothèse très simple : les deux gènes sont sur le même chromosome ! Cette situation n 'empèche manifestement pas la production (aspect qualitatif) de recombinés. Mais, on observe que les combinaisons parentales sont majoritaires (aspect quantitatif) : il n 'y a donc pas indépendance génétique. On dit qu' il existe une liaison génétique ou que les gènes sont liés.

2. Etude de tétrades et mécanisme de la recombinaison intra-chromosomique.

Il y a ségrégation 2/2 dans toutes les tétrades, pour la différence phénotypique [his-] / [his+] (donc un seul gène en cause) . Il y a également ségrégation 2/2 pour la différence phénotypique [ met-] / [met+] (donc un seul gène en cause).

Si ces deux couples d' allèles sont sur des chromosomes différents, on s 'attend à observer autant de tétrades ditypes parentales que de tétrades ditypes recombinées : ce n'est manifestement pas le cas. Puisqu'on ne peut conserver l 'hypothèse de deux chromosomes différents nous sommes conduits, comme dans l 'analyse des spores en vrac, à imaginer que les deux gènes sont sur le même chromosome.

L 'obtention de tétrades ditypes parentales correspond à une succession d 'évènements qui est banale : après constitution du diploïde, il y a duplication de l 'ADN, appariement des chromosomes homologues, puis une deuxième division. On obtient des tétrades contenant 2 individus ab+ et deux individus a+b (figure1).

Ces tétrades ditypes parentales sont les plus nombreuses. A côté d 'elles, on observe des tétrades tétratypes ( ab+ , a+b , a+b+ , ab ) et de rares tétrades ditypes recombinées (2 a+ b+ et 2 ab) ().

Ces tétrades tétratypes et ditypes recombinées proviennent d 'évènements affectant l 'ADN : les longues molécules appariées subissent des phénomènes de coupure et de réunion, grâce à un arsenal complexe de protéines, dont certaines ont des propriétés proches de celles des enzymes intervenant dans les processus de réparation ( fiche ?). Ces phénomènes se produisent après la réplication (fiche13) et affectent deux chromatides.

Lorsque les deux chromatides affectées sont issues de la même molécule modèle (on dit qu 'elles sont soeurs), il n 'y a pas de conséquence visible .

Par contre, lorsque les deux chromatides affectées sont issues de molécules-modèles différentes (on dit alors qu 'elles sont « non-soeurs »), il y a échange réciproque de matériel génétique ou crossing over (). Si un seul crossing over se produit, les deux autres chromatides non-soeurs restent intactes. A la suite des deux divisions de la méiose, on obtient alors une tétrade contenant 4 spores différentes. Deux correspondent aux chromosomes-fils intacts (deux génotypes parentaux) Deux spores correspondent aux chromosomes-fils ayant subi un échange réciproque ( deux génotypes recombinés) : il s 'agit donc d 'une tétrade tétratype (figure2, étapes 5 bis, 6 bis, 7 bis et figure3).

Il peut se produire plusieurs crossing over. Lorsque deux se produisent entre les deux gènes considérés et qu'ils affectent les 4 chromatides, on obtient 4 spores de génotypes recombinés, formant une tétrade ditype recombinée (figure2, étapes 5 ter, 6 ter, 7 ter et figure3).

On observe que les tétrades ditypes recombinées sont plus rares que les tétrades tétratypes, elles-mêmes plus rares que les tétrades ditypes parentales.

Cela signifie que l 'absence de crossing over est plus fréquente que l 'existence d 'un crossing over affectant deux chromosomes-fils différents, elle-même plus fréquente que 2 crossing over affectant les 4 chromosomes fils:

pas de crossing over > 1 crossing over > 2 crossing over

3. fréquence des recombinés.

Le test statistique habituel montre très facilement que les deux résultats observés, en spores ( 0,141) et en tétrades ( 0,126 ) ne sont pas significativement différents ().

4. Recombinaison entre gènes et centromères

Nous avons vu qu 'il existe également des tétrades tétratypes correspondant à quatre combinaisons génétiques dans le cas de gènes situés sur des chromosomes différents. Dans le thème précédent nous n'avons pas interprété leur existence. Manifestement la migration des centromères ne peut les expliquer . Par contre, la possibilté de crossing over permet d 'en rendre compte : il suffit d' un crossing-over entre l 'un des deux gènes et son centromère pour que l 'on obtienne une tétrade tétratype, lorsque deux gènes sont sur des chromosomes différents. Cela ne change strictement rien à la fréquence de recombinés qui, dans le cas de chromosomes differents, correspondent, rappelons le, à la migration aléatoire des centromères. D 'ailleurs, en spores en vrac ou en gamètes, rien n 'aurait été observé! ().

Comme on peut l 'imaginer facilement, plus le gène est éloigné de son centromère, plus il peut se produire de crossing over : la fréquence de tétrades tétratypes obtenues lorsque l 'on croise deux mutants permet d'estimer leur distance à leur centromère respectif ().

 

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Document modifié, le 27 avril, 2007