Charles Robert Darwin (12 février 1809 — 19 avril
1882) est un naturaliste anglais dont les travaux et les théories sur
l’évolution des espèces vivantes ont profondément révolutionné la
biologie. Après avoir acquis la célébrité parmi les scientifiques pour son
travail sur le terrain et ses recherches en géologie, il a apporté
l’hypothèse que toutes les espèces vivantes ont évolué au cours du temps à
partir d’un ancêtre commun ou d’un petit nombre d’ancêtres communs, grâce
au processus de sélection naturelle. Il a vu de son vivant la théorie de
l’évolution acceptée par la communauté scientifique et le grand public,
alors que sa théorie sur la sélection naturelle a dû attendre les années
1930 pour être généralement considérée comme l’explication essentielle du
processus d’évolution. Au XXIe siècle, elle constitue la base de la
théorie moderne de l’évolution. Sous une forme modifiée, la découverte
scientifique de Darwin reste le fondement de la biologie, car elle
explique de façon logique et unifiée la diversité de la vie.
 L’intérêt de Darwin pour l’histoire naturelle
lui vint alors qu’il avait commencé d’étudier la médecine à l’université
d’Édimbourg, puis la théologie à Cambridge. Son voyage de cinq ans à bord
du Beagle l’établit dans un premier temps comme un géologue dont les
observations et les théories soutenaient les théories actualistes de
Charles Lyell, et la publication de son journal de voyage le rendit
célèbre comme auteur populaire. Intrigué par la distribution géographique
de la faune sauvage et des fossiles qu’il avait recueillis au cours de son
voyage, il étudia la transformation des espèces et en conçut sa théorie
sur la sélection naturelle en 1838. Ayant constaté que d’autres avaient
été attaqués comme hérétiques pour des idées analogues, il ne se confia
qu’à ses amis les plus intimes et continua à développer ses recherches
pour imaginer et prévenir les objections. En 1858, Alfred Russel Wallace
lui fit parvenir un essai qui décrivait une théorie semblable, ce qui les
amena à faire connaître leurs théories dans une présentation commune.
Son livre de 1859, L’Origine des espèces, fit de l’évolution à partir
d’une ascendance commune l’explication scientifique dominante de la
diversification dans la nature. Il examina l’évolution humaine et la
sélection sexuelle dans La Filiation de l’homme et la sélection liée au
sexe, suivi par L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux. Ses
recherches sur les plantes furent publiées dans une série de livres et,
dans son dernier ouvrage, il étudiait les lombrics et leur action sur le
sol.
En reconnaissance de son génie, il fut enterré dans l’abbaye de
Westminster, près de John Herschel et d’Isaac Newton.
Enfance
Charles Darwin est né à Shrewsbury, dans le
Shropshire (Angleterre), le 12 février 1809 dans la maison familiale, dite
« maison Mount ». Il est le cinquième d’une fratrie de six enfants d’un
médecin et financier prospère, Robert Darwin (1766-1848) et de Susannah
Darwin (née Wedgwood) (1765-1817). Il est le petit fils d’Erasmus Darwin
(1731-1802) du côté de son père et de Josiah Wedgwood (1730-1795), du côté
de sa mère. Chacune de deux familles est largement unitarienne, bien que
les Wedgwood aient adopté l’anglicanisme. Robert Darwin, plutôt
libre-penseur, accepta que son fils Charles soit baptisé à l’église
anglicane. Néanmoins, les enfants Darwin fréquentaient avec leur mère la
chapelle unitarienne. Le prêcheur de celle-ci devient le maître d’école de
Charles, externe en 1817. En juillet de la même année, Susannah Darwin
décède alors que Charles avait huit ans. En septembre 1818, il entre à
l’école anglicane voisine, l’école de Shrewsbury, comme interne.
Darwin passe l’été de 1825 comme apprenti médecin auprès de son père
qui soignait les pauvres du Shropshire. À l’automne de la même année, il
part en Écosse, à l’université d’Édimbourg pour y étudier la médecine,
mais il est révolté par la brutalité de la chirurgie et néglige ses études
médicales. Il apprend la taxidermie auprès de John Edmonstone, un esclave
noir libre, qui lui raconte des histoires fascinantes sur les forêts
tropicales humides d’Amérique du Sud. Plus tard, dans La Filiation de
l’homme et la sélection liée au sexe, il se sert de cette expérience pour
souligner que, malgré de superficielles différences d’apparence, « les
nègres et les européens » sont très proches.
Durant sa seconde année, Charles Darwin rejoint la Société plinienne,
un groupe d’étudiants spécialement intéressés par l’histoire naturelle. Il
devient un élève de Robert Edmond Grant (1793-1874), un partisan de la
théorie de l’évolution de Jean-Baptiste de Lamarck (1744-1829), théorie à
laquelle adhère également son grand-père, Erasmus Darwin. Sur les rivages
du Firth of Forth, Charles participe aux recherches de Grant sur les
cycles vitaux des animaux marins. Ces recherches portent sur l’homologie,
théorie selon laquelle tous les animaux ont des organes similaires ne
différant que par leur complexité, ce qui indique leur ascendance commune.
En mars 1827, Darwin fait une présentation devant ses camarades pliniens
sur sa propre découverte : les spores noires souvent trouvées dans des
coquilles d’huîtres sont des œufs d’une sangsue. Il suit également les
cours de Robert Jameson (1774-1854), s’initie à la stratigraphie
géologique, à la classification des plantes et utilise les riches
collections du muséum de l’université, l’un des plus riches d’Europe de
son temps.
En 1827, son père, insatisfait par l’absence de progrès de son jeune
fils, l’inscrit pour obtenir un Bachelor of Arts au Christ’s College de
Cambridge. Il s’agit de lui donner un diplôme de théologie, dans l’espoir
que Charles devienne pasteur anglican. Néanmoins, Darwin préfère monter à
cheval et chasser que se consacrer à ses études. Avec son cousin William
Darwin Fox (1805-1880), il commence à se passionner pour la collection des
coléoptères. Fox lui fait rencontrer le révérend John Stevens Henslow
(1795-1861), professeur de botanique et grand connaisseur de ces insectes.
Darwin rejoint alors les cours d’histoire naturelle d’Henslow et devient
son élève préféré. Darwin est connu des autres professeurs comme « l’homme
qui marche avec Henslow ». Quand les examens se rapprochèrent, Darwin se
concentra sur ses études et reçut des cours privés d’Henslow. Darwin est
particulièrement enthousiaste au sujet des écrits de William Paley
(1743-1805), dont la Théologie naturelle (1802), y compris sur la
conception divine de la nature.
« Pour passer l’examen de bachelier, il était également nécessaire de
posséder les Évidences du christianisme de Paley et sa Philosophie morale.
J’y mis un grand soin, et je suis convaincu que j’aurais pu transcrire la
totalité des Évidences avec une correction parfaite, mais non, bien sûr
dans la langue de Paley. La logique de ce livre, et je puis ajouter, de sa
Théologie naturelle, me procura autant de plaisir qu’Euclide. L’étude
attentive de ces ouvrages, sans rien essayer d’apprendre par cœur, fut la
seule partie du cursus académique qui, comme je le sentais alors et comme
je la crois encore, se révéla de quelque utilité pour l’éducation de mon
esprit. Je ne me préoccupais pas à cette époque des prémisses de Paley ;
m’y fiant d’emblée, j’étais charmé et convaincu par la longue chaîne de
son argumentation. » — Autobiographie, p. 16
On a avancé que l’enthousiasme de Darwin pour l’adaptationisme
religieux de Paley avait paradoxalement joué un rôle, plus tard, lors de
la formulation de sa théorie de la sélection naturelle. Il passe ses
examens en janvier 1831 : s’il réussit bien en théologie, il remporte de
justesse les épreuves de littérature classique, de mathématiques et de
physique, arrivant dixième sur une liste de 178 élèves reçus.
Les obligations universitaires obligent Darwin à rester à Cambridge
jusqu’en juin. Suivant les conseils d’Henslow, il ne hâte pas son entrée
dans les ordres. Inspiré par le journal de voyage d’Alexander von Humboldt
(1769-1859), il organise un voyage dans l’île de Ténérife avec quelques
camarades d’études eux-mêmes fraîchement diplômés, afin d’étudier
l’histoire naturelle des tropiques. Afin de mieux se préparer, Darwin
rejoint les cours de géologie du révérend Adam Sedgwick (1785-1873) et,
durant l’été, l’assiste à la réalisation d’une carte géologique dans le
pays de Galles. Après avoir passé une quinzaine de jours avec des amis
étudiants à Barmouth, Darwin retourne chez lui et découvre une lettre
d’Henslow qui le recommande comme un naturaliste approprié (même si sa
formation n’est pas complète) pour un poste non payé auprès de Robert
FitzRoy (1805-1865), capitaine de l’HMS Beagle, lequel partait quatre
semaines plus tard pour faire la cartographie de la côte de l’Amérique du
Sud. Son père s’oppose d’abord à ce voyage de deux ans qu’il considère
comme une perte de temps, mais il est finalement convaincu par son
beau-frère, Josiah Wedgwood II (1769-1843), et finit par donner son accord
à la participation de son fils
Voyage du Beagle Sur les cinq années de
l’expédition du Beagle, Darwin passe les deux tiers du temps à terre. Il
décrit un grand nombre d’observations géologiques, récolte des organismes
vivants ou fossiles, et conserve avec méthode une riche collection de
spécimens, bon nombre d’entre eux étant nouveaux pour la science. À
plusieurs reprises durant le voyage, il envoie des spécimens à Cambridge,
accompagnés de lettres sur ses découvertes. Cela va contribuer à établir
sa réputation de naturaliste. Ses longues notes détaillées montrent sa
capacité à théoriser et forment la base de ses travaux ultérieurs. Le
journal qu’il tient à l’origine pour sa famille sera publié sous le titre
de The Voyage of the Beagle (Le Voyage du Beagle). Il y récapitule ses
observations, et fournit des informations sociales, politiques et
anthropologiques sur un grand nombre de personnes qu’il rencontre,
coloniaux comme indigènes.

Avant le départ, Robert FitzRoy avait donné à Darwin le premier volume
des Principles of Geology de Sir Charles Lyell (1797-1875) qui expliquait
les reliefs terrestres par l’accumulation de processus graduels sur de
très longues périodes de temps. À leur première escale à l’île de Santiago
au Cap-Vert, Darwin observe une bande blanche en altitude dans des
falaises volcaniques, bande composée de fragments de coraux et de
coquillages cuits. Cette observation, conforme au principe de Lyell sur la
lente montée ou descente des reliefs, donna à Darwin une nouvelle
perspective sur l’histoire géologique de l’île, et lui mit en tête
d’écrire un livre sur la géologie. Cette découverte sera suivie par
d’autres encore plus décisives. Il observe que les plaines de Patagonie
sont constituées de galets et de coquillages, comme des plages surélevées
; par ailleurs, après un tremblement de terre au Chili, il note des bancs
de moules au-dessus du niveau des pleines mers, ce qui indiquait que le
niveau de la terre venait d’être surélevé. En altitude, dans les Andes, il
observe que des arbres fossiles s’étaient développés sur une plage de
sable, à proximité de coquillages marins. Enfin il émet la théorie selon
laquelle les atolls coralliens se forment sur des cônes volcaniques en
cours de submersion, ce qu’il confirme après que le Beagle soit passé dans
les îles Cocos.
En Amérique du Sud, Darwin découvre des fossiles
de mammifères géants éteints inclus dans des couches de coquillages marins
récents, ce qui indiquait une extinction récente sans pour autant révéler
de traces de catastrophe ou de changement climatique. Bien qu’il identifie
correctement l’un de ces fossiles à un Megatherium et qu’il reconnaisse
des fragments de carapace de tatou local, il estime que ces restes sont
reliés à des espèces africaines ou européennes ; c’est seulement après son
retour, que Sir Richard Owen (1804-1892) démontre que ces restes sont en
réalité proches de créatures ne vivant qu’en Amérique.
Le deuxième volume de l’ouvrage de Charles Lyell argumente contre
l’évolutionnisme et explique la distribution des espèces par des « centres
de création ». Darwin le reçoit et le lit avec attention, il en déduit des
idées qui dépassent ce qu’avait imaginé Lyell. En Argentine, il observe
que les deux types de nandous occupent des territoires séparés mais se
chevauchant en partie. Sur les îles Galápagos, il collecte des miminis et
note qu’ils diffèrent en fonction de l’île de provenance. Il avait
également entendu dire que les Espagnols vivant dans ces régions étaient
capables de dire d’où venaient les tortues à leur simple aspect, mais il
avait conclu qu’ils les avaient eux-mêmes introduites. En Australie,
l’ornithorynque et le rat-kangourou, lui semblent si étranges qu’ils
semblent avoir été l’œuvre de deux créateurs différents.
Au Cap, Darwin et FitzRoy rencontrent Sir John Herschel (1792-1871),
qui avait récemment écrit à Lyell au sujet du « mystère des mystères »,
l’origine des espèces. Lorsqu’il organise ses notes pendant son voyage de
retour, Darwin écrit que si ses soupçons au sujet des miminis et des
tortues étaient justes, de tels faits sapent la stabilité des espèces,
puis, il ajoute prudemment le mot pourraient. Il écrira plus tard que de
tels faits m’ont semblé jeter un peu de lumière sur l’origine des
espèces.
Trois indigènes de la Terre de Feu qui avaient été accueillis par le
Beagle lors de son précédent voyage étaient à bord : ils y revenaient
comme missionnaires. Durant leur séjour de deux ans en Angleterre, ils
étaient devenus des « civilisés », aussi leurs proches apparurent-ils à
Darwin comme des sauvages malheureux et avilis. Un an plus tard, les
missionnaires qui avaient été laissés sur place avaient abandonné leur
mission et seul Jemmy Button vint à leur rencontre, il était retourné à la
vie sauvage et leur annonça qu’il n’avait aucun désir de retourner en
Angleterre et qu’il était content et comblé. À cause de cette expérience,
Darwin vint à penser que l’homme n’était pas tant éloigné des animaux, et
que la différence était surtout due à des différences d’avancées
culturelles entre civilisations plutôt qu’à des différences raciales. Il
détestait l’esclavage qu’il avait vu ailleurs en Amérique du Sud, et était
désolé des effets du peuplement européen sur les aborigènes d’Australie
comme sur les māori de Nouvelle-Zélande.
FitzRoy était chargé d’écrire le récit officiel du voyage du Beagle ;
peu avant la fin du périple, il lit le journal de Darwin et lui demande de
le retravailler afin qu’il devienne le troisième volume, celui consacré à
l’histoire naturelle.
Début de la théorie de l’évolution de Darwin
Alors que Darwin était toujours en voyage,
Henslow travaillait à faire connaître son ancien élève en communiquant à
des naturalistes éminents des exemplaires de fossiles et une brochure de
Darwin contenant ses lettres sur la géologie. Au retour du Beagle, le 2
octobre 1836, Darwin était devenu une célébrité dans les cercles
scientifiques. Après être passé à sa maison de Shrewsbury et avoir revu sa
famille, il retourna au plus vite à Cambridge pour voir Henslow, qui lui
conseilla de trouver des naturalistes capables de décrire les collections
et d’en établir le catalogue, et qui accepta lui-même de s’occuper des
spécimens de botanique. Le père de Darwin rassembla des fonds qui
permirent à son fils de devenir un homme de science financièrement
indépendant et ce fut un Darwin enthousiaste qui fit le tour des
institutions de Londres où il fut partout honoré. Il chercha alors des
experts pour décrire les collections : les zoologistes avaient un énorme
retard dans leur travail et certains spécimens couraient le risque d’être
tout simplement oubliés dans les réserves.
C’est avec une grande curiosité que Charles Lyell rencontra Darwin pour
la première fois, le 29 octobre, et il se hâta de le présenter à Sir
Richard Owen (1804-1892), un anatomiste promis à un bel avenir, qui avait
à sa disposition les équipements du Collège royal de chirurgie pour
étudier les ossements fossiles que Darwin avait recueillis. Parmi les
résultats surprenants d’Owen figurent des paresseux géants, un crâne
semblable à celui d’un hippopotame appartenant au Toxodon, un rongeur
éteint, ainsi que des fragments de carapace d’un énorme tatou disparu (le
Glyptodon), ce que Darwin avait dès le départ conjecturé. Ces créatures
fossiles n’avaient aucun rapport avec les animaux africains, mais étaient
étroitement liées aux espèces vivant en Amérique du Sud
À la mi-décembre, Darwin se rendit à Cambridge
pour organiser le travail sur ses collections et réécrire son journal. Il
rédigea son premier article où il montrait que la masse continentale
sud-américaine connaissait une lente surrection et, chaudement appuyé par
Lyell, le lut à la Société géologique de Londres le 4 janvier 1837. Le
même jour, il offrit à la Société zoologique ses exemplaires de mammifères
et d’oiseaux. L’ornithologue John Gould (1804-1881) ne tarda pas à faire
savoir que les oiseaux des Galápagos que Darwin croyait être un mélange de
merles, de « gros-becs » et de fringillidés, constituaient, en fait,
treize espèces distinctes de fringillidés. Le 17 février 1837, on élut
Darwin au Conseil de la Société géographique et, dans son adresse
présidentielle, Lyell présenta les conclusions d’Owen sur les fossiles de
Darwin, en insistant sur le fait que la continuité géographique des
espèces confirmait ses idées actualistes.
Le 6 mars 1837, Darwin s’installa à Londres pour se rapprocher de sa
nouvelle charge à la société de géographie. Il se joignit au cercle animé
formé autour de scientifiques et de savants comme Charles Babbage
(1791-1871), qui croyaient que Dieu avait d’avance ordonné la vie selon
des lois naturelles sans procéder à des créations miraculeuses ad hoc.
Darwin vivait près de son frère Erasmus, un libre-penseur, qui faisait
partie du cercle Whig et dont l’amie intime, l’auteur Harriet Martineau
(1802-1876), promouvait les idées de Thomas Malthus (1766-1834) qu’on
trouvait à la base des réformes de la Poor Law prônées par les Whigs. Les
réformes en question visaient à décourager les pauvres de se reproduire
plus que ne le permettaient les ressources alimentaires disponibles. La
question de Sir John Herschel (1792-1871) sur l’origine des espèces fut
abondamment discutée. Des personnalités du milieu médical, y compris le Dr
James Manby Gully (1808-1883) allèrent même jusqu’à rejoindre Grant dans
ses idées de transformation des espèces, mais aux yeux des scientifiques
amis de Darwin une hérésie aussi radicale mettait en péril la base divine
de l’ordre social déjà menacé par la récession et les émeutes.
Gould fit savoir alors que les moqueurs polyglottes des Galápagos
originaires des différentes îles étaient des espèces distinctes et pas
seulement des variétés, tandis que les « troglodytes » constituaient
encore une autre espèce de fringillidés. Darwin n’avait pas noté
précisément de quelles îles provenaient les exemplaires de fringillidés,
mais trouva ces renseignements dans les notes d’autres membres de
l’expédition sur le Beagle, y compris FitzRoy, qui avaient enregistré plus
soigneusement ce qu’ils avaient eux-mêmes collecté. Le zoologiste Thomas
Bell (1792-1880) montra que les tortues des Galápagos étaient indigènes
dans les îles. Avant la mi-mars, Darwin s’était convaincu que les animaux
une fois arrivés dans les îles s’étaient en quelque sorte modifiés pour
former sur les différentes îles des espèces nouvelles ; il réfléchit à
cette transformation en notant le résultat de ses pensées sur le « carnet
rouge » qu’il avait commencé sur le Beagle. À la mi-juillet, il commença
son carnet secret, le « carnet B », sur cette transformation et, à la page
36, il écrivit « je pense » au-dessus de sa première esquisse d’un arbre
montrant l’évolution
Surmenage, maladie et mariage Alors qu’il était
absorbé dans l’étude du transformisme, Darwin fut pris par des travaux
supplémentaires. Tandis qu’il en était encore à réécrire son Journal, il
entreprit de réviser et de publier les rapports d’experts sur ses
collections et, avec l’aide de Henslow, obtint une subvention de 1 000
livres sterling pour financer cette Zoologie du Voyage du H.M.S. Beagle
(en) en plusieurs volumes. Il accepta des délais impossibles à tenir pour
cette tâche ainsi que pour un livre sur la Géologie de l’Amérique du Sud
qui soutenait les idées de Lyell. Darwin finit de rédiger son Journal le
20 juin 1837 juste au moment où la reine Victoria montait sur le trône,
mais il lui restait encore à corriger les épreuves.
La santé de Darwin souffrit d’une telle surcharge de travail. Le 20
septembre 1837, il ressentit des « palpitations du cœur ». Son médecin lui
ayant prescrit un mois de repos, il se rendit alors à Shrewsbury chez des
parents du côté maternel à Maer Hall, mais il les trouva trop curieux de
ses histoires de voyages pour lui laisser quelque repos. Sa cousine Emma
Wedgwood, charmante, intelligente et cultivée, et de neuf mois plus âgée
que Darwin, soignait la tante de celui-ci, laquelle était invalide. Son
oncle Jos lui fit voir un endroit où des cendres avaient disparu sous la
glaise et suggéra qu’il pouvait s’agir du travail des lombrics. Ce fut
l’origine d’une conférence que Darwin fit à la Société géologique le 1er
novembre, et où il démontra pour la première fois le rôle des lombrics
dans la formation des sols.
William Whewell (1794-1866) incita Darwin à accepter la charge de
secrétaire de la Société géologique. Après avoir d’abord refusé cette
tâche supplémentaire, il accepta le poste en mars 1838. En dépit de la
besogne apportée par les travaux d’écriture et d’édition, il réalisa des
progrès remarquables sur le transformisme. Tout en gardant secrètes ses
idées sur l’évolution, il ne manquait aucune occasion d’interroger les
naturalistes expérimentés et, de façon informelle, les gens qui
possédaient une expérience pratique comme les fermiers et les
colombophiles. Avec le temps sa recherche s’élargit : il se renseignait
auprès de sa famille, enfants compris, du majordome de la famille, de
voisins, de colons et d’anciens compagnons de bord. Il engloba le genre
humain dans ses spéculations initiales et, le 28 mars 1838, ayant observé
un singe au zoo, il nota la ressemblance entre son comportement et celui
d’un enfant.
Tous ces efforts finirent par se faire sentir et, dès juin, il fut
forcé de s’aliter quelques jours sans interruption en raison de problèmes
d’estomac, de migraines et de symptômes cardiaques. Tout le reste de sa
vie, il devrait plusieurs fois s’arrêter de travailler avec des épisodes
de douleurs à l’estomac, de vomissements, de furoncles sévères, de
palpitations, de tremblements et d’autres malaises, surtout dans les
moments de tension, comme lorsqu’il devait assister à des réunions ou
répondre à des controverses sur sa théorie. La cause de cette maladie
resta inconnue de son vivant, et les traitements n’eurent que peu de
succès. Des essais récents de diagnostic ont suggéré la maladie de Chagas,
que lui auraient communiqué des piqûres d’insectes en Amérique du Sud, la
maladie de Menière, ou encore différentes maladies psychologiques. On
reste encore dans l’incertitude.
Le 23 juin 1838, il fit une pause dans son
travail en allant faire un peu de géologie en Écosse. Il visita Glen Roy
par un temps radieux pour voir les « terrasses » parallèles, ces replats
taillés à flanc de coteau. Il y voyait des plages surélevées : on a
démontré plus tard qu’il s’agissait des berges d’un lac glaciaire.
Complètement rétabli, il revint à Shrewsbury en juillet. Habitué à
prendre continuellement des notes sur la reproduction animale, il
griffonnait des pensées décousues concernant sa carrière et ses projets
sur deux petits morceaux de papier : l’un comportait deux colonnes
intitulées « Mariage » et « Pas de mariage ». Les avantages comprenaient
entre autres : « une compagne fidèle et une amie dans la vieillesse …
mieux qu’un chien en tout cas » ; et à l’opposé des points comme « moins
d’argent pour les livres » et « terrible perte de temps ». S’étant décidé
pour le mariage, il en discuta avec son père, et rendit ensuite visite à
Emma le 29 juillet 1838. Il n’eut pas le temps de faire sa demande en
mariage mais, contre les conseils de son père, parla de ses idées sur le
transformisme.
Pendant qu’il continuait ses recherches à Londres, l’éventail de
lectures très large de Darwin comprenait à présent « pour se distraire »
la 6e édition de l’Essai sur le Principe de Population de Malthus ;
celui-ci avait calculé qu’en raison du taux de natalité, la population
humaine pouvait doubler tous les 25 ans, mais que, dans la pratique, cette
croissance était freinée par la mort, la maladie, les guerres et la
famine. Darwin était bien préparé pour voir tout de suite que cela
s’appliquait aussi au « conflit entre les espèces », remarqué pour les
plantes par Augustin Pyrame de Candolle (1778-1841), et à la lutte pour la
vie parmi les animaux sauvages, et que c’était la raison pour laquelle les
effectifs d’une espèce demeuraient relativement stables. Comme les espèces
se reproduisent toujours plus qu’il n’y a de ressources disponibles, les
variations favorables rendraient les organismes qui en sont porteurs plus
aptes à survivre et à transmettre ces variations à leur progéniture,
tandis que les variations défavorables finiraient par disparaître. D’où
s’ensuivrait la formation de nouvelles espèces. Le 28 septembre 1838, il
nota ce nouvel éclairage de la question, le décrivant comme une sorte de
coin, introduisant des structures plus adaptées dans les espaces de
l’économie naturelle tandis que les structures plus faibles seraient
éjectées. Il disposait maintenant d’une hypothèse de travail. Au cours des
mois suivants, il compara les fermiers qui sélectionnaient les meilleurs
sujets pour l’élevage à une Nature malthusienne faisant son choix parmi
les variantes créées par le « hasard », de telle sorte que « chaque
élément [de chaque] structure nouvellement acquise fût complètement mis en
œuvre et perfectionné ». Il voyait dans cette analogie « la plus belle
partie de [sa] théorie ».
Le 11 novembre, il revint à Maer et fit sa demande à Emma, en lui
exposant encore une fois ses idées. Elle accepta puis, dans les lettres
qu’ils échangèrent, elle montra comment elle appréciait sa franchise, mais
du fait de son éducation anglicane très pieuse, elle laissa voir sa
crainte que de telles hérésies par rapport à la foi pussent mettre en
danger ses espoirs de le retrouver dans la vie éternelle. Pendant qu’il
était en quête d’un logement à Londres, les épisodes de maladie
continuèrent et Emma lui écrivit pour le presser de prendre un peu de
repos, remarquant de façon presque prophétique : « Ne retombez donc plus
malade, mon cher Charlie, avant que je puisse être auprès de vous pour
prendre soin de vous. » Il trouva dans la Gower Street ce qu’ils
appelèrent le « Cottage de l’Ara » (à cause de son intérieur criard), puis
il déménagea son « musée » à Noël. Le mariage était prévu pour le 24
janvier 1839, mais les Wedgwood retardèrent cette date. Le 24, Darwin eut
l’honneur d’être élu membre de la Royal Society.
Le 29 janvier 1839, Darwin et Emma Wedgwood se marièrent à Maer au
cours d’une cérémonie anglicane aménagée pour convenir aux Unitariens. Ils
prirent alors immédiatement le train pour Londres et gagnèrent leur
nouveau foyer
Préparation de la publication de la théorie de la sélection
naturelle Darwin avait trouvé la base de sa théorie de la
sélection naturelle, mais était bien conscient de tout le travail qui
restait à faire pour la rendre crédible aux yeux de ses collègues
scientifiques, qui le critiquaient farouchement. Le 19 décembre 1838, à la
réunion de la Société géologique dont il était secrétaire, il vit Owen et
Buckland ne rien cacher de leur haine contre l’évolution en attaquant la
réputation de son vieux maître Grant, disciple de Lamarck. Le travail
continua sur les conclusions auxquelles il était arrivé à bord du Beagle
et, en même temps qu’il consultait des éleveurs, il multipliait les
expériences sur les plantes, essayant de trouver des preuves qui
répondissent à toutes les objections auxquelles il s’attendait à partir du
moment où sa théorie serait communiquée. Quand la Narration de FitzRoy fut
publiée, en mai 1839, le Journal et Remarques de Darwin (plus connu sous
le titre Le Voyage du Beagle) qui en constitue le troisième volume
rencontra un tel succès que l’on en fit une réédition séparée la même
année
Au début de 1842, Darwin envoya à Lyell une lettre pour lui exposer ses
idées ; ce dernier fut consterné de voir que celui qui avait été son allié
refusait maintenant « de voir un commencement à chaque groupe d’espèces ».
En mai, le livre de Darwin sur les récifs coralliens fut publié après plus
de trois années de travail. En juin il écrivit alors une « esquisse
sommaire » de sa théorie tenant en 35 pages. Pour échapper aux pressions
de Londres, la famille s’installa en novembre à la campagne, dans le
domaine de Down House. Le 11 janvier 1844, Darwin écrivit à son ami, le
botaniste Sir Joseph Dalton Hooker (1817-1911), pour lui parler de sa
théorie, en disant que c’était presque avouer « un meurtre », mais à son
grand soulagement Hooker croyait qu’ « une modification graduelle des
espèces pouvait bien avoir eu lieu » et il exprima son intérêt pour
l’explication de Darwin. Vers juillet, Darwin avait développé son «
esquisse » dans un « Essai » de 230 pages. Ses craintes de voir ses idées
écartées comme une sorte de radicalisme lamarckien furent réveillées une
nouvelle fois par la controverse que suscita en octobre une publication
anonyme intitulée Vestiges de l’Histoire naturelle de la Création. Ce
livre qui fut un best-seller accrut l’intérêt de la classe moyenne pour le
transformisme, et ouvrit ainsi la voie à Darwin. Cet ouvrage fut néanmoins
sévèrement attaqué par les scientifiques reconnus, ce qui rappela à Darwin
la nécessité de répondre à toutes les difficultés avant de rendre publique
sa théorie. Darwin termina son troisième livre de géologie en 1846 et
entreprit à partir d’octobre une vaste étude sur les cirripèdes avec
l’aide de Hooker. En janvier 1847, Hooker lut l’« Essai » de Darwin et lui
renvoya ses observations ; c’était la critique sereine dont Darwin avait
besoin, même si Hooker remettait en question son rejet de l’idée d’une
création continue.
Pour essayer de traiter son état maladif chronique, Darwin se rendit à
Malvern, une ville thermale, en 1848. La cure de quelques mois lui fit un
grand bien et il put reprendre son travail à son retour. À la mort de son
père le 13 novembre, il est néanmoins tellement affaibli qu’il ne peut
assister aux funérailles. En 1849, sa fille chérie, Annie, tomba malade,
ce qui réveilla sa peur que sa maladie puisse être héréditaire. Après une
longue série de crises elle mourut en avril 1851, et Darwin perdit toute
foi en un Dieu bienveillant.
Les huit années que Darwin passa à travailler sur les cirripèdes lui
permirent de trouver des « homologies » qui confortaient sa théorie en
montrant que de légers changements morphologiques pouvaient permettre à
différentes fonctions d’affronter des conditions nouvelles. En 1853, il
obtint la Médaille royale de la Royal Society, ce qui établit sa
réputation comme biologiste. En 1854, il reprit le travail sur sa théorie
des espèces et, en novembre, se rendit compte que la divergence dans le
caractère de descendants pouvait s’expliquer par le fait qu’ils s’étaient
adaptés « à des situations différentes dans l’économie de la nature ».
La publication de la théorie de la sélection
naturelle
Au début de 1855, Darwin cherchait à savoir si les œufs et les graines
étaient capables de survivre à un voyage dans l’eau salée et d’élargir
ainsi la distribution de leurs espèces à travers les océans, . Hooker était de plus en plus sceptique quant à
la conception traditionnelle selon laquelle les espèces étaient immuables,
mais leur jeune ami Thomas Henry Huxley (1825-1895) était fermement opposé
à l’évolution. Lyell était intrigué par les spéculations de Darwin sans se
rendre compte de leur portée. Après avoir lu un article d’Alfred Russel
Wallace (1823-1913) sur l’Introduction des espèces, il trouva des
ressemblances avec les idées de Darwin et lui conseilla de les publier
pour établir son antériorité. Bien que Darwin ne vît là aucune menace, il
commença à rédiger un article court. Trouver des réponses aux questions
difficiles l’arrêta plusieurs fois, et il élargit son projet à un « grand
livre sur les espèces » intitulé « La Sélection naturelle ». Il continua
ses recherches, obtenant des renseignements et des exemplaires auprès de
naturalistes du monde entier, y compris Wallace qui travaillait à Bornéo.
En décembre 1857, Darwin reçut de Wallace une lettre lui demandant si son
livre examinerait les origines humaines. Il répondit qu’il éviterait un
tel sujet, « si encombré de préjugés », tandis qu’il encourageait l’essai
de théorisation de Wallace, en ajoutant « Je vais beaucoup plus loin que
vous ».
Darwin en était à mi-chemin de son livre quand, le 18 juin 1858, il
reçut une lettre de Wallace qui décrivait la sélection naturelle. Bien
qu’ennuyé d’avoir été « devancé », il la transmit à Lyell comme convenu
et, bien que Wallace n’eût pas demandé qu’elle fût publiée, proposa de
l’envoyer à n’importe quel journal que choisirait Wallace. Sa famille
était alors plongée dans l’angoisse car dans le village des enfants
mouraient de la scarlatine, aussi remit-il l’affaire entre les mains de
Lyell et de Hooker. Ils convinrent de présenter ensemble à la Linnean
Society le 1er juillet « Sur la Tendance des espèces à former des
variétés; et sur la Perpétuation des variétés et des espèces par les
moyens naturels de la sélection ». Comme Charles, le dernier enfant des
Darwin, alors encore au berceau, venait de mourir de la scarlatine, son
père était trop bouleversé pour être présent.
Sur le moment on prêta peu d’attention à l’annonce de cette théorie ;
le président de la Linnean remarqua en mai 1859 que l’année précédente
n’avait été marquée par aucune découverte révolutionnaire. Par la suite,
Darwin ne put se souvenir que d’une seule recension, celle du professeur
Haughton, de Dublin, proclamant que « tout ce qu’il y avait là de nouveau
était inexact, et tout ce qui était exact n’était pas nouveau ». Darwin
s’acharna pendant treize mois pour écrire un résumé de son « grand livre
», souffrant de problèmes de santé, mais encouragé constamment par ses
amis scientifiques. Lyell s’arrangea pour le faire publier par Sir John
Murray (1841-1914).
Sur l’Origine des Espèces au moyen de la Sélection Naturelle, ou la
Préservation des Races les meilleures dans la Lutte pour la Vie, titre
d’habitude raccourci sous la forme L’Origine des espèces, eut auprès du
public un succès inattendu. Le tirage entier de 1 250 exemplaires était
déjà réservé quand il fut mis en vente chez les libraires le 22 novembre
1859. Darwin y développe « une longue argumentation » fondée sur des
observations détaillées, y expose des inférences et la prise en compte des
objections attendues. Sa seule allusion à l’évolution chez l’homme était
l’affirmation discrète que « des lumières seront jetées sur l’origine de
l’homme et son histoire ». Il évitait le mot « évolution », controversé à
l’époque, mais à la fin du livre il concluait que « des formes sans cesse
plus belles et plus admirables ont été élaborées et continuent à l’être ».
Sa théorie est exposée de façon simple dans l’introduction :
« Comme il naît beaucoup plus d’individus de chaque espèce qu’il n’en
peut survivre, et que, par conséquent, il se produit souvent une lutte
pour la vie, il s’ensuit que tout être, s’il varie, même légèrement, d’une
manière qui lui est profitable, dans les conditions complexes et
quelquefois variables de la vie, aura une meilleure chance pour survivre
et ainsi se retrouvera choisi d’une façon naturelle. En raison du principe
dominant de l’hérédité, toute variété ainsi choisie aura tendance à se
multiplier sous sa forme nouvelle et modifiée. »
Les réactions à sa publication
L’ouvrage de Charles Darwin suscita un vif
intérêt dans le public ainsi qu’une controverse qu’il suivit de près,
conservant les coupures de presse avec les recensions, les articles, les
railleries, les parodies et les caricatures. L’évolution par la sélection
naturelle fut largement discutée, voire dénigrée, particulièrement dans
les communautés religieuse et scientifique. Bien que Darwin ait été
soutenu par certains scientifiques (par exemple, Thomas Henry Huxley,
Ernest Renan ou encore Ernst Haeckel qui le popularisera très tôt en
Allemagne), d’autres hésitaient à accepter sa théorie à cause de la
capacité inexpliquée des individus à transmettre leurs capacités à leurs
descendants. Ce dernier point était pourtant étudié au même moment par
Gregor Mendel, mais il ne semble pas que les deux hommes aient communiqué
ensemble. Même avec les lois de Mendel, le mécanisme sous-jacent resta un
mystère jusqu’à ce que l’on découvrît l’existence des gènes.
Les critiques hostiles eurent tôt fait de tirer les conséquences qui
n’étaient pas exprimées, comme le fait que les hommes descendraient des
singes. Pourtant, dans L’Origine des espèces, Darwin ne parle pas des
origines de l’homme. Le public confond les idées exprimées dans le livre
de Darwin avec celles de Lamarck, qui cinquante ans auparavant avait
avancé cette idée sans alors faire scandale. Parmi les réponses
favorables, les recensions de Huxley adressaient des critiques à Richard
Owen, chef de l’establishment scientifique qu’il voulait ébranler. Le
verdict d’Owen resta inconnu jusqu’à ce que son compte rendu d’avril eût
condamné le livre.
L’establishment scientifique de l’Église d’Angleterre, qui comprenait
les anciens maîtres de Darwin à Cambridge, Sedgwick et Henslow, réagit de
façon hostile, malgré un accueil favorable dans la génération plus jeune
des naturalistes professionnels. En 1860, la publication d’Essays and
Reviews (en) par sept théologiens anglicans libéraux détourna de Darwin
l’attention des hommes d’Église. Ces derniers condamnèrent comme hérétique
une telle manifestation de la critique libérale car on y trouvait entre
autres cet argument que par les miracles Dieu enfreindrait ses propres
lois, opinion athée, ainsi que l’éloge du « magistral volume de M. Darwin
[soutenant] le grand principe que la nature a le pouvoir d’évoluer par
elle-même ».
Le débat public le plus fameux eut lieu à Oxford
lors d’une réunion de l’Association britannique pour l’Avancement des
Sciences. Le professeur John William Draper avait prononcé un long
plaidoyer en faveur de Darwin et du progrès social, c’est alors que
l’évêque d’Oxford, Samuel Wilberforce, s’en prit à Darwin. Dans la
discussion qui s’ensuivit, Joseph Dalton Hooker prit énergiquement parti
pour Darwin tandis que Thomas Huxley se constituait comme le « bouledogue
de Darwin » – il fut le défenseur le plus farouche de la théorie de
l’Évolution à l’époque victorienne. Les deux partis se séparèrent en
criant victoire chacun, mais Huxley resta célèbre par sa réponse : comme
Wilberforce lui avait demandé s’il descendait du singe par son grand-père
ou par sa grand-mère, Huxley grommela : « C’est Dieu lui-même qui vient de
le livrer entre mes mains » et il répliqua qu’il « préférerait descendre
d’un singe plutôt que d’un homme instruit qui utilisait sa culture et son
éloquence au service du préjugé et du mensonge ».
Le débat déborde le cadre de la science, de l’Église anglicane et du
protestantisme. Les autorités de l’Église catholique entrent dans la
polémique. Dès 1860, en effet, Darwin est condamné par une réunion
d’évêques qui se tient à Cologne. Le pape intervient ensuite à plusieurs
reprises pour dénoncer la thèse selon laquelle l’homme descendrait du
singe.
Tenu éloigné des discussions publiques par sa maladie, Darwin n’en
lisait pas moins avec passion ce qu’on rapportait d’elles et recevait des
soutiens par courrier. Asa Gray convainquit un éditeur aux États-Unis de
payer des droits d’auteur, et Darwin fit venir et distribua la brochure de
Gray qui montrait que la Sélection naturelle n’était nullement
incompatible avec la Théologie naturelle. En Grande-Bretagne ses amis, y
compris Hooker et Lyell, prenaient part aux discussions scientifiques que
Huxley menait avec rage pour briser la domination de l’Église et de
l’amateurisme aristocratique, incarnée par Owen, en faveur d’une nouvelle
génération de professionnels de la science. Owen commit l’erreur
d’invoquer (à tort) certaines différences anatomiques entre le cerveau du
singe et le cerveau humain, et accuser Huxley de soutenir que « l’homme
descend du singe ». Huxley fut heureux de soutenir cette opinion et sa
campagne, qui dura plus de deux ans, fut une vraie catastrophe pour Owen
et la « vieille garde », qui se trouvèrent éliminés. Les amis de Darwin
formèrent le Club X et aidèrent à lui valoir l’honneur de la Médaille
Copley que lui décerna la Royal Society en 1864.
Vestiges avait déjà suscité dans le public le plus vaste intérêt, et
l’Origine des espèces fut traduite dans un grand nombre de langues et
connut de nombreuses réimpressions, devenant un texte scientifique de base
accessible aussi bien à une classe moyenne curieuse de cette nouveauté
qu’aux simples travailleurs qui se pressaient aux conférences de Huxley.
La théorie de Darwin correspondait d’ailleurs aux différents mouvements de
l’époque et elle devint un des fondements clés de la culture
populaire.
Descent of Man, la sélection sexuelle, la botanique et la
transmission des caractères acquis
Malgré des rechutes continuelles pendant les
vingt-deux dernières années de sa vie, Darwin continua son travail. Il
avait publié un résumé de sa théorie, mais les aspects les plus
controversés de son « grand livre » restaient incomplets, y compris la
preuve explicite du fait que l’humanité descendait d’animaux antérieurs à
elle, et la recherche de causes possibles qui étaient à la base du
développement de la société et des capacités mentales de l’homme. Il
devait encore expliquer des caractéristiques sans utilité évidente si ce
n’est dans un but esthétique. Il continuait à faire des expériences, à
chercher, à écrire.
Quand la fille de Darwin tomba malade, il suspendit ses expériences sur
les semences et les animaux domestiques pour l’accompagner au bord de la
mer ; là il s’intéressa aux orchidées sauvages et il en résulta une étude
révolutionnaire sur la façon dont la beauté des fleurs sert à assurer la
pollinisation par les insectes et à garantir une fertilisation avec
croisement. Comme avec les balanes, les parties homologues remplissaient
des fonctions différentes chez les différentes espèces. De retour chez
lui, il retrouva son lit de malade dans une pièce que remplissaient ses
expériences sur les plantes grimpantes. Il reçut la visite d’Ernst Haeckel
(1834-1919), un de ses admirateurs qui avait propagé l’évangile du
darwinisme en Allemagne. Wallace continuait à le soutenir, bien qu’il
versât de plus en plus dans le spiritisme.
De la variation des animaux et des plantes sous l’action de la
domestication constituait la première partie du « grand livre » que Darwin
projetait (développement du « résumé » qu’il avait publié sous le titre
L’Origine des espèces) ; cette première partie s’enfla jusqu’à devenir
deux gros volumes, le forçant à laisser de côté l’évolution humaine et la
sélection sexuelle ; elle se vendit bien malgré sa taille.
Dans ce livre, Darwin soutient qu’une des causes de l’évolution est
l’hérédité des caractères acquis. (Contrairement à une opinion répandue,
en effet, Darwin ne rejeta pas l’idée lamarckienne de la transmission des
caractères acquis.) Il s’efforce de donner une explication théorique de
l’hérédité des caractères acquis à l’aide de l’hypothèse de la pangenèse.
En 1880, deux ans avant sa mort, il écrira encore à la revue Nature pour
nier, contrairement à ce qu’avait prétendu Wyville Thomson, qu’il eût fait
de la sélection naturelle le seul moteur de l’évolution et pour réaffirmer
son adhésion à la théorie de l’effet de l’usage et du non-usage
(désignation en termes plus lamarckiens de l’hérédité des caractères
acquis).
Un livre supplémentaire de démonstrations, qui traitait dans le même
style de la sélection naturelle, fut écrit en grande partie, mais resta
inédit jusqu’à ce qu’il fût transcrit en 1975.
La question de l’évolution humaine avait été soulevée par ses partisans
(et ses détracteurs) peu de temps après la publication de L’Origine des
espèces, mais la contribution propre de Darwin sur ce sujet devait venir
plus de dix ans plus tard avec l’ouvrage en deux volumes La Filiation de
l’homme et la sélection liée au sexe publié en 1871. Dans le deuxième
volume, Darwin expliquait en toutes lettres sa conception de la sélection
sexuelle pour expliquer l’évolution de la culture humaine, les différences
entre les sexes chez l’homme et la différenciation des races humaines,
aussi bien que la beauté du plumage chez les oiseaux (qui ne semblait pas
le résultat d’une adaptation). L’année suivante Darwin publia son dernier
travail important, L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux,
consacré à l’évolution de la psychologie humaine et sa continuité avec le
comportement des animaux. Il développa ses idées selon lesquelles chez
l’homme l’esprit et les cultures ont été élaborés par la sélection
naturelle et sexuelle, conception qui a connu une nouvelle jeunesse au
cours des trois dernières décennies avec l’émergence de la psychologie
évolutionniste. Comme il concluait dans La Filiation de l’Homme, Darwin
estimait qu’en dépit de toutes les « qualités nobles » de l’humanité et
des « pouvoirs qu’elle avait développés » : « L’homme porte toujours dans
sa constitution physique le sceau ineffaçable de son humble origine ».
Ses expériences et ses recherches concernant l’évolution trouvèrent
leur conclusion dans des livres sur le mouvement des plantes grimpantes,
les plantes insectivores, les effets des croisements des plantes et leur
auto-fertilisation, les différentes formes de fleurs sur des plantes de la
même espèce et La Capacité des plantes à se mouvoir. Dans son dernier
livre, il revenait à l’influence des lombrics sur la formation des
sols.
Il mourut à Downe, dans le Kent, le 19 avril 1882. Il pensait devoir
être enterré au cimetière St. Mary à Downe, mais sur les instances des
collègues de Darwin, William Spottiswoode (1825-1883), président de la
Société royale, intervint pour qu’il reçut des funérailles officielles et
il fut enterré dans l’Abbaye de Westminster, près de l’astronome John
Herschel (1792-1871) et du physicien Isaac Newton (1643-1727).
Les enfants de Darwin
Les Darwin eurent dix enfants : deux moururent en
bas âge et la disparition d’Annie, alors qu’elle n’avait que dix ans, fut
une catastrophe pour ses parents. Charles était un père dévoué et
exceptionnellement attentif envers ses enfants. Chaque fois qu’ils
tombaient malades il craignait que ce fût dû à la consanguinité puisqu’il
avait épousé sa cousine, Emma Wedgwood. Il se pencha sur cette question
dans ses écrits, mettant en opposition les avantages des croisements chez
beaucoup d’organismes. Malgré ses craintes, la plupart des enfants qui
survécurent firent des carrières remarquables, se distinguant même à
l’intérieur de la famille Darwin-Wedgwood déjà fort brillante.
Parmi eux, George, Francis et Horace devinrent membres de la Royal
Society, se signalant respectivement comme astronome, botaniste et
ingénieur civil. Son fils Leonard, d’autre part, fut militaire,
politicien, économiste et eugéniste ; il eut comme disciple Sir Ronald
Aylmer Fisher (1890-1962), statisticien et biologiste de l’évolution.
Les conceptions religieuses
Bien
que sa famille fût en majorité non-conformiste et que son père, son
grand-père et son frère fussent libres-penseurs, au début Darwin ne
doutait pas de la vérité littérale de la Bible. Il avait fréquenté une
école de l’Église d’Angleterre, puis étudié la théologie anglicane à
Cambridge pour embrasser une carrière ecclésiastique. Il avait été
convaincu par l’argument téléologique de William Paley qu’on voyait dans
la nature un dessein qui prouvait l’existence de Dieu ; cependant au cours
du voyage du Beagle il se demanda, par exemple, pourquoi de superbes
créatures avaient été faites au fond des océans, là où personne ne
pourrait les voir, ou comment il était possible de concilier la conception
de Paley d’un dessein bienveillant avec la guêpe ichneumon qui paralyse
des chenilles pour les donner à ses œufs comme des aliments vivants. Il
restait tout à fait orthodoxe et citait volontiers la Bible comme une
autorité dans le domaine de la morale, mais ne croyait plus à
l’historicité de l’Ancien Testament.
Alors qu’il menait ses recherches sur la transformation des espèces il
savait que ses amis naturalistes y voyaient une hérésie abominable qui
mettait en péril les justifications miraculeuses sur lesquelles était
fondé l’ordre social ; c’était la sorte d’argument radical qu’utilisaient
alors les dissidents et les athées pour attaquer la position privilégiée
de l’Église d’Angleterre en tant qu’Église établie. Bien que Darwin eût
écrit que la religion était une stratégie tribale de survivance, il
croyait toujours que Dieu était le législateur suprême. Cette conviction
fut peu à peu ébranlée et, avec la mort de sa fille Annie en 1851, il
finit par perdre toute foi dans le christianisme. Il continua à aider son
église locale pour le travail paroissial, mais le dimanche il allait se
promener pendant que sa famille se rendait à l’église. Désormais il
jugeait préférable de regarder la douleur et les souffrances comme le
résultat de lois générales plutôt que d’une intervention directe de Dieu.
Interrogé sur ses conceptions religieuses, il écrivit qu’il n’avait jamais
été un athée dans ce sens qu’il aurait nié l’existence de Dieu et que, de
façon générale, « c’est l’agnosticisme qui décrirait de la façon la plus
exacte [son] état d’esprit ».
Le Récit de Lady Hope, publié en 1915, soutenait que Darwin était
revenu au christianisme au cours de sa dernière maladie. Une telle
affirmation a été démentie par ses enfants et les historiens l’ont écartée
comme fausse. Sa fille, Henrietta, qui était à son lit de mort, a dit
qu’il n’était pas retourné au christianisme. Ses derniers mots ont été, en
fait, adressés à Emma : « Rappelez-vous la bonne épouse que vous avez été
».
Les interprétations politiques
Les écrits et les théories de Darwin combinés avec les découvertes
génétiques de Gregor Mendel (1822-1884) (la Théorie synthétique de
l’évolution) sont considérés comme formant la base de toute la biologie
moderne. Cependant, la renommée et la popularité de Darwin ont conduit à
associer son nom à des idées et des mouvements qui n’ont seulement qu’une
relation indirecte à son œuvre, et parfois sont directement à l’opposé de
ses convictions.
Eugénisme
À la suite de la publication par Darwin de L’Origine, son cousin
Francis Galton appliqua ses conceptions à la société humaine, commençant
en 1865 à promouvoir l’idée de « l’amélioration héréditaire », qu’il
élabora de façon détaillée en 1869. Dans La Filiation de l’homme, Darwin
convint que Galton avait démontré qu’il était probable que le « talent »
et le « génie » chez l’homme étaient héréditaires, mais il écartait comme
trop utopiques les changements sociaux que proposait Galton. Ni Galton ni
Darwin ne soutenaient une intervention gouvernementale et ils pensaient
que, tout au plus, l’hérédité devrait être prise en considération par les
individus dans la recherche de partenaires. En 1883, après la mort de
Darwin, Galton commença à appeler eugénisme sa philosophie sociale. Au XXe
siècle, les mouvements eugénistes devinrent populaires dans un certain
nombre de pays et participèrent aux programmes de contrôle de la
reproduction tels que les lois de stérilisations contraintes. Par la
suite, celles-ci furent mal vues du fait de leur usage par la rhétorique
de l’Allemagne nazie dans ses objectifs de « pureté » raciale.
Darwinisme social
Les idées issues de Thomas Malthus et de Herbert Spencer ont appliqué
les idées d’évolution et de « survie du plus apte » aux sociétés, aux
nations et aux entreprises et elles sont devenues populaires à la fin du
XIXe siècle et au début du XXe siècle, au point d’être utilisées pour
défendre différentes perspectives idéologiques, parfois contradictoires, y
compris l’économie du laissez-faire, le colonialisme, le racisme et
l’impérialisme. Le terme « darwinisme social » date des années 1890, mais
il est devenu courant en tant que terme polémique au cours des années 1940
quand Richard Hofstadter a critiqué le conservatisme du laissez-faire. Ces
concepts préexistaient à la publication par Darwin de L’Origine en 1859,
puisque Malthus était mort en 1834 et que Spencer avait publié en 1851 ses
livres sur l’économie et en 1855 ses livres sur l’évolution. Darwin
lui-même insistait pour que la politique sociale n’obéît pas simplement
aux concepts de lutte et de sélection dans la nature, et pensait que la
sympathie devait s’étendre à toutes les races et toutes les nations.
Les commémorations
Durant
la vie de Darwin, de nombreuses espèces ainsi que des toponymes lui ont
été dédiés. Ainsi le prolongement occidental du canal Beagle qui relie ce
dernier à l’océan Pacifique, le canal de Darwin, porte son nom. C’est le
capitaine FitzRoy qui le lui a dédié après une action de Darwin : parti
avec deux ou trois marins, il a le réflexe de les conduire sur le rivage
lorsqu’il voit un pan d’un glacier s’effondrer dans la mer et provoquer
une forte vague, celle-ci aurait probablement balayé leur embarcation. Le
mont Darwin lui a été dédié lors de son 25e anniversaire. Lorsque le
Beagle était en Australie en 1839, John Lort Stokes (1812-1885),ami de
Darwin, a découvert un port naturel que le capitaine de vaisseau John
Clements Wickham (1798-1864) a baptisé Port Darwin. La colonie de
Palmerston, fondée en 1869, fut rebaptisée Darwin en 1911. Elle est
devenue la capitale du Territoire du Nord de l’Australie. Cette ville
s’enorgueillit de posséder une université Charles Darwin et un parc
national Charles Darwin. Le Darwin College de l’université de Cambridge,
fondé en 1964, a été baptisé ainsi en l’honneur de la famille Darwin, en
partie parce qu’elle possédait une partie des terrains sur lesquels il
était bâti.
Les 14 espèces de pinsons qu’il avait découvertes dans les îles
Galápagos ont été surnommées les pinsons de Darwin. En 2000, une image de
Darwin a été utilisée par la banque d’Angleterre pour le billet de dix
livres sterling en remplacement de l’image de Charles Dickens.
Bibliographie Principales œuvres de Charles
Darwin
- Journal of Researches into the Geology and Natural History of
the Various Countries by H.M.S. Beagle, Londres, Henry Colburn,
1839, 614 pp. [2e édition : 1845 ;
167 éditions et tirages en langue anglaise jusqu’en 1972]
- The Structure and Distribution of Coral Reefs. Being the First
of the Geology of the Voyage of the Beagle, under the Command of Capt.
Fitzroy, during the Years 1832 to 1836, Londres, Smith, Elder and
Co., 1842. [2e édition : 1874 ;
3e édition : 1889]
- Geological Observations on the Volcanic Islands Visited during
the Voyage of H.M.S. Beagle, together with some Brief Notices of the
Geology of Australia and the Cape of Good Hope, Londres, Smith,
Elder and Co., 1844. [2e édition :
1876 ; 3e : 1891]
- Geological Observations on South America, Londres, Smith,
Elder and Co., 1846.
- Geological Observations on Coral Reefs, Volcanic Islands and on
South America, Londres, Smith, Elder and Co., 1851. Reprise des
textes de 1842, 1844 et 1846. Rééditions souvent abrégées.
- A Monograph of the Sub-Class Cirripedia, with Figures of all the
Species, vol. I : The Lepadidae, Londres, The Ray Society,
1851.
- A Monograph of the FossIl Lepadidae, or Pedunculated Cirripedes
of Great Britain, vol. II, The Balanidae (or Sessile Cirripedes),
Londres, The Ray Society, 1854.
- « On the Tendency of Species to Form Varieties, and on the
Perpetuation of Varieties by Natural Means of Selection » (avec
A.R. Wallace), Journal of Proceedings of the Linnean Society of
London (Zoology), vol. III, n°9, 1er
juillet 1858, pp. 1-62.
- On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the
Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life
(L’Origine des espèces), Londres, John Murray, (24 novembre)
1859. [2e éd. : 7 janvier 1860 ; 3
éd. : avril 1861 ; 4e éd. :
juin 1866 ; 5e éd. : 1869 ;
6e éd. : février 1872]
- On the Various Contrivances by which British and Foreign Orchids
are Fertilised by Insects, and on the Good Effects of
Intercrossing, Londres, John Murray, 1862. [2e éd. : 1877]
- On the Movements and Habits of Climbing Plants, Londres,
Longman, 1865. [2e éd. : 1875]
- « Queries about Expression », 1867. Article publié par
R.B. Freeman et P. J. Gautrey, « Charles Darwin’s Queries about
Expression », Bulletin of the British Museum of Natural
History, vol. 4, 1972, pp. 205-219.
- The Variation of Animals and Plants under Domestication,
Londres, John Murray, 2 volumes, 1868. [2e
éd. : 1875]
- The Descent of Man, and Selection in Relation to Sex,
Londres, John Murray, 2 volumes, 1871. [2e
éd. : 1874 avec une note additionnelle de Th. Huxley]
- « Pangenesis », Nature, vol. 3, 27 avril 1871,
Proceedings of the Royal Society, vol. 19, pp. 393-410.
- The Expression of the Emotions in Man and Animals, Londres,
John Murray, 1872. [2e éd. : (par Francis
Darwin) en 1890.
- « Origin of Certain Instincts », Nature, vol. 7, 3 avril
1873, pp. 417-418.
- Insectivorous Plants, Londres, John Murray, 1875. [2e éd. : 1888, revue par Francis Darwin]
- The Effects of Cross and Self-Fertilisation in the Vegetable
Kingdom, Londres, John Murray, 1876. [2e
éd. : 1878]
- « Report of the Royal Commission on the Pratice of Subjecting
Live Animals to Experiments for Scientific Purposes» , Londres, Her
Majesty’s Stationery Office, 1876, pp. 234, 4662-4672.
- The Different Forms of Flowers on Plants of the Same
Species, Londres, John Murray, (9 juillet) 1877. [2e éd. : 1878 ; 3e éd. : 1880, avec une préface de Francis
Darwin]
- « A Biographical Sketch of an Infant », Mind, vol. 2,
juillet 1877, pp. 285-294. [Trad. française dans la Revue scientifique,
vol. 13, 1877, pp. 25-29]
- « Preliminary Notice » dans E. Krause, Erasmus Darwin,
Londres, John Murray (ouvrage traduit de l’allemand), 1879.
- The Power of Movement in Plants (en collaboration avec
Francis Darwin), Londres, John Murray, 1880.
- The Formation of Vegetable Mould, through the Action of Worms,
with Observations on their Habits, Londres, John Murray, (10
octobre) 1881.
- « The Action of Carbonate of Ammonia on Chlorophyll
Bodies », Journal of the Linnean Society of London (Botanic), vol.
19, 1882, pp. 262-284. Communication lue par Francis Darwin le 6 mars et
le 28 août 1882.
Œuvres posthumes
- « Préface » à A. Weismann, Studies in the Theory of
Descent. With Notes and Additions by the Author, Londres, Sampson
Low, 1882, pp. V-VI.
- « Préface » à Hermann Müller, The Fertilisation of
Flowers, Londres, Macmillan, 1883, pp. VII-X.
- « Essay on Instinct », in G.J. Romanes, Mental
Evolution in Animals. With a Posthumous Essay on Instinct by Charles
Darwin, Londres, Kegan Paul, 1883, pp. 355-384.
- Francis Darwin (éd.), The Life and Letters of Charles Darwin,
including an Autobiographical Chapter, Londres, John Murray, 2
volumes, 1887. [Traduction française de l’Autobiographie,
incomplète, Paris, Belin, 1985]
- More Letters of Charles Darwin, Londres, John Murray, 1903,
2 volumes.
- F. Darwin et A.C. Seward (éds.), Emma Darwin, Wife of Charles
Darwin. A Century of Family Letters, Cambridge University Press,
1904.
- Francis gélinas (ed.), The Foundations of the ‘Origin of
Species’. Two Essays written in 1842 and 1844, Cambridge University
Press, 1909. Trad. partielle en français (La Renaissance du Livre,
1925), rééditée en 1992 sous le titre : Ébauche de l’Origine
des espèces (essai de 1844), Presses universitaires de Lille.
- ‘Beagle’ Diary : Charles Darwin’s Diary of the Voyage of
H.M.S. Beagle, ed. by Nora Barlow, Cambridge University Press,
1933.
- The Autobiography of Charles Darwin, with Original Omissions
Restored, ed. by Nora Barlow, Londres, Collins, 1958.
- Darwin’s Journal, ed. by Sir Gavin De Beer, Bulletin of the
British Museum, 1959, 2, pp. 1-21.
- Charles Darwin’s Notebooks, 1836-1844. Geology, transmutation of
species, metaphysical enquiries, British Museum of Natural History,
Cambridge University Press, 1987.
- M.A. Di Grigorio, N.W. Gill (eds), Charles Darwin’s Marginalia,
vol. I, New York-Londres, Garland, 1990.
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mais reste encore que c’est une théorie ses idée…